biografía        bibliografía




PÉTER ESTERHÁZY



   

1950 born in Budapest
1968 finishes secondary school at the Budapesti Piarista Gimnázium
1969-74 studies mathematics at the Eötvös Loránd University, Budapest
1974 first writings published in various literary journals
1974-78 works as a mathematician in the Informatics Institute of the Ministry of Furnaces and Heavy Machinery
1977 first volume award of the Artists' Fund
1978 becomes a freelance writer


His prizes:
1980 Medal of the Mikes Kelemen Circle (The Netherlands)
1981 Aszú Prize of the Mozgó Világ literary journal
1981 member of the German Academy of Poetry
1983 Füst Milán Award
1984 Déry Tibor Award
1986 József Attila Prize
1986 Örley Prize [with Nádas Péter]
1988 Vilenica Prize (Slovenia)
1990 Book of the Year Award
1990 Krúdy Gyula Prize
1992 Life-work Award of the Soros Foundation
1993 member of the Széchenyi Accademy of Literature and Arts
1993 Prize of the Literary Festival in Rome [Premio Opera di Poesia]
1993 Radio Play Award of the Hungarian Radio
1994 Free Press Prize
1994 Ordre des Arts et des Lettres
1995 Prize of the Soros Foundation
1995 Bjorson Prize (Norway)
1995 Prize of the Magyar Művészetért Foundation
1996 Kossuth Prize
1996 Szép Ernő Award
1996-97 fellowship from the Berliner Wissenshaftkolleg
1999 Man of the Year Prize (Magyar Hírlap)
1999 Austrian State Prize
2001 Hungarian Literature Prize
2001 Márai-Prize
2002 Herder-Prize
2004 Grinzane Cavour-Prize (Italy)
2004 Peace Prize pf the German Book Trade
2004 Pro Europa Prize
2006 Premio Letterario Internazionale Pablo Neruda
2008 Angelus-Prize (Wrocław)

— Hungarian Literature

— Esterházy Péter


Esterhàzy, la lettre aux pères.



On a tous en nous un petit quelque chose d'Esterhàzy. Cette chanson, bien des Hongrois d'avant-hier, d'hier et même d'aujourd'hui l'ont fredonnée. «Qui saurait passer en revue toutes les douces mélodies qui résonnaient chez les Hongrois d'autrefois lorsqu'ils prononçaient le nom d'Esterhàzy», écrit Péter Esterhàzy au coeur de son nouveau livre, Harmonia Cælestis, à la fois le meilleur de ses livres et la symphonie orchestrée de ceux qui l'ont précédé. Avec le Livre des mémoires de son ami Péter Nadas, c'est l'autre grand livre que la Hongrie nous a donnés ces dix dernières années. D'ailleurs c'est aussi, à sa manière (fantasque, trouée et douée en mentir-vrai), le livre des mémoires des siens que vient d'écrire le dernier rejeton de la famille.

Le nom Esterhàzy se confond avec l'histoire de la Hongrie comme aucun nom de famille de notre histoire de France. «Dans l'imaginaire hongrois, le nom de mon père incarnait tout ce qui pouvait faire de la vie un paradis sur terre», écrit Péter. Rien étonnant à ce que le régime communiste ait pris grand soin d'en effacer les traces, changeant ainsi Esterhaza, la plus célèbre des demeures familiales, en Fertöd. Dans une Petite histoire de la Hongrie publiée aux éditions Corvina à Budapest en 1989, à la lettre E on trouve bien un Erik le rouge, explorateur norvégien, mais pas le moindre Esterhàzy. Le grand-père de l'écrivain avait cependant été Premier ministre du pays, l'ancêtre des ancêtres, Miklos, fut vice-roi de Hongrie en 1625 et chevalier de la Toison d'or, son fils Pàl, un grand bâtisseur et aussi un auteur et compositeur (l'une de ses oeuvres a justement pour titre Harmonia Cælestis), à un autre Miklos, le frère de Pàl, on doit Esterhaza, «le Versailles hongrois» aux 126 pièces où Haydn fut maître de chapelle durant vingt-quatre ans, etc. En 1945, les communistes confisquèrent les châteaux et les 130 000 hectares. Au début des années 50, les parents de Péter furent exilés à la campagne; cependant, plus d'un paysan hongrois continua de donner du «monsieur le comte» au père de l'enfant Péter.

Toute cette histoire traverse ce livre d'histoires où serpente l'Histoire. Péter Esterhazy a rassemblé de nombreux matériaux historiques et interviewé les membres encore vivants de la famille. «J'espérais que ces entretiens allaient résoudre des problèmes, explique-t-il. Mais il n'y a que moi qui puisse les résoudre. J'ai pu utiliser très peu de choses. Parfois un joli mot un peu ancien, une façon de parler (en français dans le texte), mais pas plus.» Ce n'est donc pas un livre d'histoire, pas même un classique roman familial même si le narrateur dit avoir songé à cet ouvrage «depuis l'enfance». C'est mieux que cela: le livre qu'un fils adresse, offre, inflige et paie (comme un dû) à son père, aux pères de son père, les brassant tous dans l'unique et forcément terrible figure du père pour solde de tout comte et de tous comptes. Un livre des pères. Un pèse-pères.

«Même s'il part de la réalité, ce livre doit être lu comme un roman, dont on peut exiger ni plus ni moins que ce qu'on roman peut offrir (tout)», est-il écrit page 277. La preuve quelques lignes plus bas: «Il a montré la préface à mon père, ça lui a beaucoup plu (à mon père)», lit-on. «Il», c'est le fils aîné, le narrateur, Péter Esterhàzy. Or la préface dont il est question n'existe pas.

Le livre se divise en deux. Le Premier Livre a pour titre Phrases numérotées de la vie de la famille Esterhàzy. Le nom de tel ou tel Esterhàzy n'apparaît pas, le mot Esterhàzy est comme frappé d'interdit, tous deviennent: «mon père» (psychanalystes, attention, les dés sont pipés). «Je n'ai jamais voulu dire quelque chose sur la famille au XVIIe siècle. J'ai peut-être voulu dire quelque chose sur mon père, insiste Péter Esterhàzy. Mon père est plus important que de savoir s'il a vécu maintenant ou au XVIIe siècle car "mon père" a été défini par l'écriture. Ce fut une décision très importante et une idée toute simple: changer le sujet de la phrase et y glisser à la place "mon père". Je devais formuler toutes les histoires comme les histoires de mon père. Dès lors, j'ai tout vu à partir du regard de mon père. Pendant un an et demi, j'ai écrit en état d'ivresse. Si je dis "Péter est un salaud", même si je connais la personne, c'est une observation qui ne nous émeut pas particulièrement. Mai si je dis "mon père est un salaud", on est interloqué. On n'a pas le droit de toucher au père. C'est une loi fondamentale de notre civilisation. Et, dans cette première partie, j'y touche en permanence. Plusieurs textes en deviennent scandaleux. Je n'aurais pas osé les écrire. Mais intervertir les mots, ça je sais le faire, mon courage s'est limité à mettre un mot à la place d'un autre.»

Ainsi «mon père» a-t-il écrit «un recueil de cantiques Harmonia cælestis» édité à Vienne en 1711. La narrateur souligne que la plupart de ces chants «n'émanent pas» de «mon père», lequel n'est pas le seul signataire de leur composition. Ce qui vaut tout autant pour l'oeuvre homonymique de Péter Esterhàzy, le fils des fils, dans un jeu de miroirs et de citations qui ne surprendra aucun de ses lecteurs habituels. Ainsi lit-on: «Lorsque à l'aube de ce jour d'avril, jour fixé par décret impérial pour leur exécution, les gardiens pénètrent dans sa cellule, mon père était agenouillé sur le sol, les mains jointes, en prière.» A trois mots près ­ il suffit de remplacer «mon père» par «le jeune Esterhazy» ­, la phrase (et celles qui suivent) reprennent une nouvelle écrite par Danilo Kis dans son Encyclopédie des morts. Péter Esterhàzy confesse avoir un «rapport quasi mythique» avec cette nouvelle lue dans les années 80. «Je me souviens très bien du moment où j'ai lu la première phrase, de mon excitation, l'ai eu le sentiment de lire mon propre texte mais un texte que je ne pourrai jamais écrire. Car, quand j'écris le mot Esterhàzy, cela devient tout de suite beaucoup plus compliqué. Or, cette narration était simple et belle. J'ai écrit une carte à Danilo en lui disant: c'est mon texte, merci, je le prends.» Et il l'a pris. C'est là l'une des mille alcôves secrètes de ce livre des livres à la fois limpide, sinueux et mystérieux comme tous les secrets de famille et comme tous les grands textes. La déclinaison des ancêtres en un seul «mon père» accouche d'une force narrative peu commune. Non sans un constant humour, ce qui ne surprendra pas non plus les lecteurs d'Esterhàzy. Pas plus que la panoplie des styles mis en oeuvre: «Mon père est mort en absorbant un pâté aux truffes»; «mon père était évêque. Ce sont des choses qui arrivent»; «un chevalier noir, mon père, couvert d'une armure noire, se tient devant le château de l'enfer»; «mon père, il voulait pas cracher la pension alimentaire. Tu peux crever, espèce de sale pute, faisait-il savoir à ma mère».

«J'ai eu la tentation de tout mettre dans ce livre, nous dit encore l'auteur. Par exemple, j'ai trouvé une très vieille photo, belle comme un daguerréotype. On y voit une dame très sévère habillée à la mode du XIXe, de type habsbourgeois, une arrière-arrière-grand-tante. Et, sur le dos de la photo, d'une manière très violente il était écrit: quel vieux salaud tu fais! Cet objet, c'est un chapitre de roman. Mais collé tel quel, cela ne marche pas. C'est pourquoi j'ai pensé jeter tous les documents rassemblés. Je n'ai rien jeté. Mais j'ai préféré tout oublier pour ensuite mieux m'en souvenir.»

Le Livre deux, qui a pour titre les Confessions d'une famille Esterhàzy, est plus linéaire (mais pas trop) et commence par cet incipit d'anthologie, c'est un serviteur, le vieux Menyhért Toth Menyus, qui, au salon, parle à sa maîtresse: «Madame la comtesse, puis-je me permettre, il faudrait que je vous dise que les communistes sont là.» Ce jour-là, la pendule du salon s'arrête. «Ce n'est pas le temps qui s'arrête, seulement la pendule» dira perfidement l'horloger. Péter Esterhàzy nous livre là une extraordinaire vision de sa famille aristocratique dérivant et godillant dans le monde communiste, reléguée à la campagne et cultivant des patates. Non sous un mode réaliste ou vériste mais dans une traversée fantastique et fantasmatique de haut lignage à travers la figure centrale mais aucunement unique du père, le premier à être né «sans rang et sans usage», et des rapports avec son fils aîné, Péter, qu'il appelle «Pierrot» les soirs où il rentre bourré. Délation, humiliation, antisémitisme (1), tout passe dans cette traversée, jusqu'au final où le père rejoignant le fils écrit tout comme lui à moins que cela ne soit l'inverse, tape des mots, encore des mots: «Plutôt que le bruit sans âme de la machine, c'était un râle, un sanglot étouffé et une supplication qui imprégnaient toute la création; c'est sur cette voix que s'achève la vie de mon père, sur cette voix tonitruante, horriblement gâchée, commune, effrayante, faussement implorante, sur cette impuissance, cette unicité et cette plénitude.» Cette voix qui est tout autant, et pour cause, celle de Péter Esterhàzy, lequel aura mis neuf ans à écrire ce livre au rebours de toute plate confession. «Je regarde aussi dans ma vie ce qui peut être utilisé pour un livre, dit-il encore. C'est assez inhumain. L'autre jour, ma fille a rêvé qu'elle allait poser une question à mon père, son grand-père. Comme dans une opérette, j'ai dit à ma fille: demande-lui s'il m'a beaucoup aimé. Ça m'a tellement ému que j'ai commencé à pleurer. Je ne voulais pas que ma fille voit ça. Alors, je me suis réfugié dans la salle de bains. Et, dans la glace, j'ai vu cet homme ridicule de 51 ans, les larmes aux yeux, et ma première pensée a été: où vais-je pouvoir utiliser ça? Mes larmes, mon côté ridicule étaient réels, mais mon regard qui voyait tout cela était lui aussi réel.»

(1) Et l'Esterhàzy de l'affaire Dreyfus dans tout ça? Dans une page «Rebonds» de Libération, Péter Esterhàzy avait raconté comment cet homme était entré dans la famille par la fenêtre, qu'il n'était pas un «premier né», plutôt un faux né, bref qu'il était juste «un peu» un Esterhàzy. Faut-il préciser que ce «Rebonds» était une première mouture d'une des pages de Harmonia Cælestis?

Thibaudat Jean-Pierre

— Libération


Katalin Bedi's interview with writer Péter Esterházy on literature, reviews, Esti and possible lives.



Does Péter Esterházy read reviews of his works? What does he think when he's labeled 'literary writer'?

He does. I think everybody does, even if they say they don't. I sometimes don't pay attention when reading them. And when Javított kiadás was released, I think there were some mean reviews. I stopped reading them after the 'auftakt' and checked them only much later.

There are all kinds of labels. It shows a hastily formed opinion. Kosztolányi was labeled a literary writer too, wasn't he? It can't be that bad then. If being a literary writer means only writing for literateurs then it's nonsense. If it means that literature itself plays a bigger role than usual then it's a true commonplace. It doesn't seem to be such an important label after all."

A couple of examples from Mottókollekció: "What an ugly craft this is." (Kosztolányi). "Write, don't whine." (Danilo Kiš) What is Péter Esterházy's literary motto? And what does writing mean to Péter Esterházy? Is it a way of introspection too? Self-reflection? Retreat? Or are these words too big?

Yes, they are, although I can only answer in big words too. Writing is my life. I can't separate them. I didn't plan it this way but it doesn't matter now. I thought I'd have more time outside my study. On the other hand, that is where I feel best (not considering the trivial options of course). Perhaps writing is self-reflection and a retreat, but I don't think of it this way. Or it doesn't interest me this way.

I collected mottos in Bevezetés too. Most of them would fit well, like 'Write, don't whine.' or 'Oh how many flaws I would have if I didn't write.' by Flaubert. I don't have a motto. At the most, there are mottos that could be mine. I had one on my wall once, from a Mándy interview. The interviewer mentioned that Mándy had a new car, a Renault R4, and Mándy replied 'So it's an R?" I viewed this as my motto for a while, partly as an expression of innocence, partly because you need to be really distant to be present or to at least be able to say something about being here. 'So it's an R?' I try not to forget that.

How does Péter Esterházy write? Does he have a daily minimum, or does he only work when the muse kisses him?

A bureaucratic minimum, yes (not quantity, time). The muse sometimes kisses, sometimes it doesn't. I'm afraid it only does if you have a daily minimum set.

'A possible me', 'a possible life'. Can you imagine your life without literature, writing and reading?

No. Or maybe, being a chef. I knew everything about food, otherwise being a grunt. Although you need a sense of form too. But I wouldn't know anything about Goethe – nor myself. But people would still come to me from Szentes to taste my tripe with trotters. And my filled lobster.

Kosztolányi on Kornél Esti: "To desribe inside out who or what he was to me would be adifficult task." What does the map to the relationship maze of Kosztolányi - Kornél Esti - Esti - Esterházy look like?

To describe that would be a difficult task. I couldn't add anything of value to what has been already written about this. I can't take anything away from it either. It's either a map or a maze anyway. I'd be surprised if anyone could reveal everything about a text.

Regardless of the author, all next works have to take the burden of the previous books. In Esti's case, it is the Esterházy books on the one hand and the works of Kosztolányi on the other. Did you take this into account while writing Esti?

You don't need to take it into account. If it's a burden, you feel it. Here, I had the same difficulties as with Harmónia, that it is so obvious. It's ment for me. This is serious pressure. But there's always something. If an object is too near, that's a problem. If it's too far away then that's the problem. If it's neither near nor far, or there is no object, that's a problem too. And when for some mysterious reason there's no problem, you create one, and then you have a problem.

If Kosztolányi lived, what would you two talk about? How about Kornél Esti?

I'd absolutely mix them up (see 'To desribe inside out who or what...') and we'd have a pleasant friendly chat. I think I'd ask him about the country, particularly about patriotism. Patriotism and form. Oh and Radákovich too. And what would I say? I would thank them.

In Esti, alteregos, forms of speech appear and disappear instead of characters. The text is text, it emphasizes its artificial origin. This method widens literature – we all become alteregos. The figures weaved from our associations and our lives are born inside our heads. Was this your goal?

Well... No I didn't have this in mind. As always, I just wanted the reader to be involved, so that the book is about them a bit too. It doesn't matter if it happens through identifying themselves with the protagonist (in case there is one), a character, the story, fate, lovability, or the way you describe it. It's all the same. The writer has to address the reader somehow. This is the goal.

Esti has never talked as much as when he returned from Moscow. It wasn't the quantity really, but the soul, the zest, the colour with which he talked. He seemed to be hiding something. If I wanted to joke, I'd say he had been hiding his life. Or this joke is his life, to be earnest. It is clear that the end (this?) is his life." In his "biographical (re)interpretation of Kornél Esti", Mihály Szegedy-Maszák refers to facing death in regards to the book. Are you 'coming from Moscow' with Esti?

To be honest, I don't understand the question. Does death come from Moscow? If I had written it when I wrote Kis magyar pronográfia, this would be probalbly true, a legitimate association. Sure I use the word 'death' more frequently than when I was thirty. Even I die in the end... Who would've thought...?"

István Margócsy's review in ÉS reads: "Esti accounts for the hardships, proprieties, simplicity and complexity of writing prose." Perhaps this is where the undefinability of the genre originates. Small prose mosaic? Phrases? Diary entries? Novel? How would you label this work?

I don't know. I don't really care. I mean, I myself won't gain anything by knowing. But I believe it certainly is no novel or a diary entry. Phrases is not enough, small prose mosaic doesn't say anything, although maybe that's what it is. A string of thoughts, maybe. I'd say (perhaps) it's the same genre as Kosztolányi's Kornél Esti book."

"It would be good to live a bit longer." But how? What's Péter Esterházy's ideal day like?

I think the quote refers to just living, it doesn't matter how. Freedom and love, I need these two I need [sic]. And freedom means work. Or the monastic labour with friends added. Although I think right now I'm dreaming about the optimal day, the possible best. The impossible best, I'd like that.But that wouldn't be a 'day'. Well, until it turns out, I'll just do my job. Doesn't matter how.

— InCite Culture&Critic


Buon vecchio Esterházy



A Donald Rumsfeld, che usa con sufficienza l'espressione “Vecchia Europa”, bisognerebbe che qualcuno regalasse il nuovo e colossale romanzo di Péter Esterházy, “Harmonia Caelestis”, appena uscito per Feltrinelli nella traduzione italiana a quattro mani di Giorgio Pressburger e Antonio Sciacovelli (pagg. 716, € 22). Il cinquantatreenne scrittore ungherese racconta semplicemente la vicenda della sua famiglia. Ma, siccome gli Esterházy sono una stirpe che ha un millennio di storia maturata nel cuore magiaro del Continente, che s'è ornata di ogni genere di carica ecclesiastica e politica e che, al momento di esserne spogliata da parte del comunismo, possedeva in terreni, palazzi, castelli e feudi mezza Ungheria, nelle sue settecentosei pagine “Harmonia Caelestis” racconta davvero cosa significa questa espressione: “Vecchia Europa”. Designa un continente la cui storia – e questo Esterházy lo dipinge nel modo più beffardo – non è estranea ad alcuna guerra, violenza, trucco, imbroglio, ladrocinio. E che intanto – e questo lo scrittore lo racconta con ammirazione malinconica – inventava arte e bellezza.

In “Harmonia Caelestis” sono gli avi maschi che si prodigano nella prima attività: avi chiamati nel libro tutti “il mio buon padre”, da Benedetto, il capostipite del quindicesimo secolo che il discendente scrittore Péter accredita davvero come tale (mentre attribuisce i precedenti capostipiti alla leggenda), al suo genitore vero. Sono invece le ave a custodire i frutti della seconda attività: è guardando i raffinati portaritratti, la carta da lettere, i sigilli sul tavolo della nonna che il piccolo Péter, venuto al mondo nell'Ungheria comunista, scopre che “prima c'era un altro mondo”. Un mondo dove gli Esterházy erano Tutto, mentre ora ora non sono Nulla. Da infinito a zero: Péter Esterhazy? È stato matematico prima di diventare romanziere e drammaturgo. E, come racconta nelle belle pagine della Patria sta in alto, racconto compreso nella raccolta Dall'est uscita nel '90 per e/o, fratello di un campione del calcio ungherese, Marton, è stato lui stesso calciatore: “Qualcuno, all'epoca, diceva che ero io il più bravo” scherza ora, “ma non è vero”. Harmonia Caelestis è un romanzo che contribuisce all'uscita della narrativa ungherese del cono d'ombra cui era relegata, salvo sporadicissime eccezioni, dagli anni Quarante. Una riemersione siglata dal Nobel ricevuto nel 2002 da Imre Kertész: buon amico di Esterházy, come questi stesso racconta, e come testimoniavano i brindisi con cui lo vedemmo festeggiare l'anno scorso alla Fiera di Francoforte il premiato, rimasto a Budapest.

Il suo romanzo scende per i rami di una genealogia tutta maschile. E' di avo maschio in avo maschio che lei narra la storia di famiglia: nell'Ungheria degli Arpad, poi di re Mattia Corvino e degli Asburgo, nell'Ungheria repubblica sovietica nel 1919, ritornata monarchica e diventata filonazista negli anni Venti e Trenta, repubblica popolare del '49 fino al crollo dell'impero sovietico. Perché ha scritto questa saga in modo patrilineare?

Non è così del tutto. La verità è che il libro si concentra sulla figura paterna ed è perciò che di tutti i miei avi parlo come di un “buon padre”. Me c'è sempre, nel romanzo, una voce sottotono che riconduce a mia madre. Io volevo scrivere un romanzo storico, ma anche una saga familiare. Dopo aver fatto le ricerche necessarie e dopo aver preso nota che nel 1700 il mio bis-bisnonno si era comportato in modo sfrontato e coraggioso nei confronti del suo principe, mi sono reso conto che non mi interessava raccontare questo tipo di gesta. Il mio avo Nikolaus Esterházy, è scritto nei documenti, era “partito al galoppo in una pianura bellissima”, ma questo genere di storia non mi avvinceva. La frase, invece, mi sono accorto, acquistava un senso per me se quel Nikolaus Esterházy diventava “mio padre”: “il mio buon padre era partito al galoppo in una pianura bellissima”. Lì ho capito che dovevo rielaborare la saga di una famiglia intorno alla figura del Padre. E questo ha prodotto un effetto, dentro di me, straordinario: la Storia ha acquistato una valenza mia, personale.

Nel romanzo lei, si capisce, è il figlio primogenito dell'ultimo dei “buoni padri”. Il genitore che il comunismo ha costretto a trasformarsi da aristocratico in operaio di una fabbrica di fibbie di plastica e in parquettista e che depreca la levità e l'ironia con cui questo figlio guarda alla leggenda di famiglia. Nella vita vera la sua storia familiare per lei ha costituito una ricchezza o un peso di cui liberarsi?

Venire da una famiglia che ha una storia arricchisce. Sarebbe un peso se la mia famiglia avesse ancora quel potere e quella forza. Ma non li possiede più. Se fossimo ancora gli Esterházy che siamo stati per secoli, cì che sarebbe complicato. Sarei anch'io un aristocratico potente, e questo mi porrebbe un problema: non potrei occuparmi di parole. Dovrei scegliere, o occuparmi del ruolo e delle proprietà, o delle parole.

Ci aveva già pensato Hans Magnus Enzensberger a raccontare, a modo suo, la storia degli Esterházy, in un libro per bambini che narra di un coniglio di famiglia principesca che porta proprio questo nome. Che effetto le ha fatto essere trasformato in buffo eroe da fiaba?

L'ho tradotto in ungherese, quel libro. La traduzione non è corretta, ma la considero buona. Enzensberger ha giocato sull'assonanza tra il coniglio Esterházy e l' “osterhase”, il coniglio pasquale della tradizione tedesca. Mi sono arrabbiato moltissimo, per essere apparentato a un coniglio...

Il suo nuovo romanzo, “Edizione corretta”, uscito in Ungheria e Germania e di prossima pubblicazione in Italia, svela quanto le è successo mentre raccoglieva il materiale per “Harmonia Caelestis”: lei ha scoperto che suo padre, il suo “buon padre”, che manifestava tanto disprezzo per gli spioni che intercettavano le telefonate nella repubblica popolare d'Ungheria, era al servizio del Kgb. Come l'ha scoperto e con quali sentimenti?

E' quello che spiego, appunto, nel libro, che non è un romanzo. E' un libro di storia. Mio padre, ho scoperto, era al servizio dei servizi segreti russo-ungheresi. Io ho voluto mostrare come la vita nei paesi dell'Est potesse diventare violenta e aggressiva, indipendentemente dagli eventi. Una dittatura fa alla gente un male molto maggiore di quanto si possa pensare. Il peso del passato, quanto questo peso sia stato immenso, noi lo veniamo capendo e assorbendo ora, molto lentamente.

Lei è considerato uno scrittore “sperimentale”, per ciò che questo termine significa: ha fatto ampio ricorso, per esempio, al pastiche, cucendo nei suoi testi citazioni da scritti di altri autori. Qualcuno ha giudicato, negli anni Ottanta, che questa forma fosse anche un suo modo criptico di comunicare col lettore, nato sotto un regime illiberale. La fine del comunismo le ha regalato libertà nuova, nella scrittura?

Si è liberi per definizione, oggi. Non vuol dire che siamo più liberi. E' per definizione che siamo tali. Ed essere liberi non vuol dire essere felici. Gli abitanti dell'Est Europa dopo il crollo del comunismo hanno incontrato la delusione: si aspettavano la felicità e non l'hanno raggiunta. In una dittatura per definizione non si può vivere, si può solo sopravvivere, si campa così, come capita. Ma in una democrazia la vita può essere buona, media, sotto la media, pessima.

Una curiosità, ancora, su “Harmonia Caelestis”. Riguarda alcuni singolari segni grafici. Il libro è diviso in due parti: la storia millenaria della famiglia, poi il tempo che alberga lei, il Novecento nel quale nascono il suo vero “buon padre” e sua madre e nel quale i due mettono al mondo e allevare voi figli. La prima parte è disseminata di vistosi capolettera e punti grossi come coriandoli. Perché?

La prima parte del libro ha come suo proprio titolo Frasi numerate: si tratta appunto di frasi brevi o lunghe, ciascuna col suo numero progressivo. Non si tratta di frasi in senso grammaticale, sono tali perché ognuna condensa un pezzo di storia. Il capolettera e il grosso punto servono a indicarne l'inizio e la fine.

Alla vigilia della guerra in Iraq il Segretario alla Difesa americano Rumsfeld, ha usato l'espressione “Vecchia Europa” come un insulto a Germania e Francia, contrarie all'attacco. Lei, che la Vecchia Europa ce l'ha nel Dna, cosa ne pensa?

Così come l'ha intesa Rumsfeld l'espressione era di sicuro una scemenza, perché la Nuova Europa è anche Vecchia Europa. Penso, però, e la situazione nella quale siamo lo dimostra, che l'Europa deve trovare assolutamente un'unità. C'è una differenza tra Est e Ovest, ma dobbiamo trovare l'unità: abbiamo un passato comune, dobbiamo trovare un futuro comune.

L'Ungheria, come altri paesi dell'ex Est socialista, si è schierata a favore della guerra. Lei era favorevole o contrario?

Messa così, mi scusi, suona come una frase ridicola. Mi fa venire in mente quell'attore che alla tv ha dichiarato: “Sono di parere opposto, rispetto al presidente Bush”. Che è simile a dire “Non mi trovo d'accordo con Dio”. Ma non voglio lasciare la domanda senza risposta: la guerra è terribile.

Signor Esterházy, sappiamo che oggi è il suo compleanno: cinquantatrè primavere. Come festeggia?

Devo, purtroppo, andare dal dentista...

Per lei non è però un dramma: in “Harmonia Caelesti” racconta perfino dello zio dal quale andavate a farvi cavare denti con la gaiezza di chi si reca a un tè pomeridiano.

E al ritorno, stasera, stapperò di sicuro una bottiglia di buon vino.

Maria Serena Palieri

— Il Porto Ritrovato